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Pitcairn et les circuits juridiques de l’Empire britannique dans le monde pacifique
Published online by Cambridge University Press: 02 April 2025
Les historiens ont fait preuve d’une étonnante indifférence à l’égard des dimensions juridiques de l’« empire informel ». Cet article montre que les pratiques juridiques ont en réalité créé et soutenu une indétermination de souveraineté. Nous nous intéressons à Pitcairn, une petite île isolée du Pacifique, peuplée en 1789 par une poignée de Britanniques et de Tahitiens après la mutinerie du Bounty. Administrateurs britanniques, professionnels du droit, voyageurs et historiens ont avancé un enchevêtrement de revendications, chacune liée à une chronologie particulière, sur la manière dont Pitcairn est devenue britannique. Une des thèses qui ressort de ces controverses est qu’un capitaine de la marine britannique aurait pris possession de l’île en 1838. Nous remettons en question cette version ainsi que d’autres récits prédominants en montrant comment les multiples reconfigurations des liens entre l’île et l’empire ont non seulement empêché la première d’être absorbée dans le second, mais également de devenir une entité indépendante. Les visites intermittentes des officiers de la marine britannique ont progressivement constitué un système juridique improvisé, tandis que des factions rivales parmi les habitants de l’île ont orienté les agents impériaux dans le soutien de projets locaux, y compris des tentatives de prise de pouvoir sur l’île. Pendant un siècle et demi, ces processus ont maintenu Pitcairn au seuil de l’empire. La portée de cette histoire dépasse largement le cas de ce minuscule territoire. En nous appuyant sur une étude micro-historique de Pitcairn afin d’éclairer plus largement l’agencement des relations entre entités politiques, nous montrerons que cette souveraineté indécise a pour origine ce que nous proposons d’appeler les « circuits juridiques » de l’empire au xixe siècle.
Historians have been remarkably incurious about the legal dimensions of “informal empire.” This article shows that legal practices in fact created and sustained sovereign indeterminacy. Our focus is Pitcairn, a small, remote island in the Pacific settled in 1789 by a handful of Britons and Tahitians after the mutiny on the Bounty. British officials, legal professionals, island sojourners, and historians have advanced a jumble of claims, each attached to a particular timeline, about how Pitcairn became British. One prominent view is that a single British navy captain took possession of the island in 1838. We challenge this and other prevailing accounts by showing how repeated reconfigurations of island-imperial connections kept Pitcairn from being either enfolded into the empire or established as an independent entity. Intermittent visits by British naval officers gradually constituted a make-shift legal system, while rival factions of islanders steered imperial agents to support local schemes, including bids for island rule. For a century and a half, these processes held Pitcairn on the threshold of the empire. The significance of the narrative recounted here extends far beyond one small island. This microhistory illustrates broad processes of interpolity ordering and locates the origins of sovereign indeterminacy in the “legal circuitry” of nineteenth-century empire.
Les auteurs tiennent à remercier Lisa Ford, Mark Hickford et les relecteurs anonymes des Annales HSS pour les précieuses remarques qu’ils ont faites sur des versions antérieures de ce texte.
1. Christian & Ors v. R., Appeal Judgment, UKPC 47, ILDC 553 (UK 2006), 30 oct. 2006, Privy Council of the United Kingdom, https://www.bailii.org/uk/cases/UKPC/2006/47.html.
2. Nous nous appuyons sur l’approche développée par Lauren Benton et Lisa Ford, qui qualifient ces processus de « systémiques, mais non systématiques » sur le plan de leur déploiement et de leurs effets. Voir Lauren Benton et Lisa Ford, Rage for Order: The British Empire and the Origins of International Law, 1800-1850, Cambridge, Harvard University Press, 2016, p. 2.
3. Sur le développement d’approches d’histoire du Pacifique relativement distinctes les unes des autres, voir David Armitage et Alison Bashford, « Introduction: The Pacific and Its Histories », in D. Armitage et A. Bashford (dir.), Pacific Histories: Ocean, Land, People, New York, Palgrave, 2014, p. 1-28 ; Paul Kramer, « A Complex of Seas: Passages Between Pacific Histories », Amerasia Journal, 42-3, 2016, p. 32-41.
4. Sarah Heathcote, « Legal Models and Methods of Western Colonisation of the South Pacific », Journal of the History of International Law, 24-1, 2022, p. 62-101, ici p. 64-65.
5. Peter Cane, Lisa Ford et Mark McMillan, « Editors’ Introduction », in P. Cane, L. Ford et M. McMillan (dir.), The Cambridge Legal History of Australia, Cambridge, Cambridge University Press, 2022, p. 1-16, ici p. 7.
6. Saliha Belmessous (dir.), Native Claims: Indigenous Law Against Empire, 1500-1920, Oxford, Oxford University Press, 2011. Pour des exemples liés à la souveraineté des autochtones et à leurs droits, voir Lisa Ford, Settler Sovereignty: Jurisdiction and Indigenous People in America and Australia, 1788-1836, Cambridge, Harvard University Press, 2011 ; Bain Attwood, Empire and the Making of Native Title: Sovereignty, Property and Indigenous People, Cambridge, Cambridge University Press, 2020 ; Mark Hickford, Lords of the Land: Indigenous Property Rights and the Jurisprudence of Empire, Oxford, Oxford University Press, 2011 ; Kristy Gover, « Legal Pluralism and Indigenous Legal Traditions », in P. Schiff Berman (dir.), The Oxford Handbook of Global Legal Pluralism, Oxford, Oxford University Press, 2020, p. 847-875.
7. Sur le cadre d’analyse des « rencontres juridiques », voir P. Cane, L. Ford et M. McMillan, « Editors’ Introduction », art. cit. ; sur le « pluralisme juridique », voir notamment Lauren Benton, Law and Colonial Cultures: Legal Regimes in World History, 1400-1900, Cambridge, Cambridge University Press, 2001 ; Shaunnagh Dorsett, « Plural Legal Orders: Concept and Practice », in P. Cane, L. Ford et M. McMillan (dir.), The Cambridge Legal History of Australia, op. cit., p. 19-39.
8. À propos de la politique juridictionnelle, voir L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., chap. 5-6 ; nous traitons de la question des accords de protection qui intègrent les petites îles dans la sphère d’influence de l’empire dans notre article « Protection Shopping Among Empires: Suspended Sovereignty in the Cocos-Keeling Islands », Past & Present, 257-1, 2022, p. 209-247 ; sur le régime de l’intervention navale, voir Lauren Benton, They Called It Peace: Worlds of Imperial Violence, Princeton, Princeton University Press, 2024, chap. 5.
9. Nous proposons une discussion approfondie de cette critique des postulats habituels au sujet du pluralisme juridique dans Lauren Benton et Adam Clulow, « Interpolity Law and Jurisdictional Politics », Law and History Review, 3, 2023, p. 1-13. Pour une critique du pluralisme juridique d’une perspective soulignant la capacité des peuples autochtones à réorienter et refaçonner le droit européen, voir Alecia Pru Simmonds, « Cross-Cultural Friendship and Legal Pluralities in the Early Pacific Salt-Pork Trade », Journal of World History, 28-2, 2017, p. 219-248.
10. Le début et le milieu du xixe siècle représentent une période creuse en matière de droit international : voir L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., chap. 1 et 7 ; Martti Koskenniemi, To the Uttermost Parts of the Earth: Legal Imagination and International Power, 1300-1870, Cambridge, Cambridge University Press, 2021, chap. 9.
11. L’ouvrage canonique qui défend cette thèse est celui de Stuart Banner, Possessing the Pacific: Land, Settlers, and Indigenous People from Australia to Alaska, Cambridge, Harvard University Press, 2007. À rapprocher de B. Attwood, Empire and the Making of Native Title, op. cit.
12. Reinhard Koselleck, Le futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, trad. par J. et M.-C. Hoock, Paris, Éd. de l’EHESS, [1979] 2016.
13. À propos des États au conditionnel futur, voir Natasha Wheatley, The Life and Death of States: Central Europe and the Transformation of Modern Sovereignty, Princeton, Princeton University Press, 2023.
14. Pour une analyse détaillée des motivations des marins et de leurs revendications, voir Greg Dening, Le Bounty. Passions, pouvoir, théâtre : histoire d’une mutinerie, trad. par B. Matthieussent, Toulouse, Anacharsis, [1992] 2023.
15. Ce pari se révélerait bon pour certains et mauvais pour d’autres. Sur les 14 mutins emprisonnés à Tahiti, 4 ont péri dans le naufrage du HMS Pandora sur le trajet du retour à Londres. Les autres sont passés devant la cour martiale : 7 ont été acquittés ou pardonnés, 3 ont été pendus.
16. Andrew Lewis, « Pitcairn’s Tortured Past: A Legal History », in D. Oliver (dir.), Justice, Legality, and the Rule of Law: Lessons from the Pitcairn Prosecutions, Oxford, Oxford University Press, 2009, p. 39-62, ici p. 48.
17. Cité dans Tillman W. Nechtman, The Pretender of Pitcairn Island: Joshua W. Hill – The Man Who Would Be King Among the Bounty Mutineers, Cambridge, Cambridge University Press, 2018, p. 251.
18. Kew, The National Archives (ci-après TNA), ADM 1/53, Lettre du capitaine Russell Eliott (HMS Fly) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 25 janv. 1839, contenant le règlement relatif à la nomination d’un magistrat sur l’île de Pitcairn. Eliott disait avoir dénombré 99 résidents sur l’île. On trouve plusieurs orthographes du nom d’Eliott dans les archives.
19. TNA, CO 201/370, Communication officielle de James Stephen, sous-secrétaire d’État permanent aux Colonies, à George William Lyttelton, sous-secrétaire parlementaire à la Guerre et aux Colonies, 14 janv. 1846.
20. Il paraît vraisemblable que l’enquête lancée par Alan Lennox-Boyd, conservateur, soit liée à un débat qui eut lieu cette année-là : les sujets des nouveaux pays membres du Commonwealth devaient-ils jouir des mêmes droits à l’immigration en Grande-Bretagne que les ressortissants des anciens territoires membres ? Les conservateurs défendaient une conception large des droits en matière d’immigration. Voir David Welsh, « The Principle of the Thing: The Conservative Government and the Control of Commonwealth Immigration, 1957-59 », Contemporary British History, 12-2, 1998, p. 51-79.
21. TNA, CO 1036/17, Pitcairn Group, constitutional status, 1955, fol. 7.
22. British Settlements Act, 1887 (années 50 et 51 du règne de Victoria, chap. 54), https://www.legislation.gov.uk/ukpga/Vict/50-51/54.
23. Cet élargissement a été suscité par le meurtre d’une femme et d’un enfant à Pitcairn l’année précédente. Le secrétaire aux Colonies, concluant que c’était là le seul moyen de poursuivre l’accusé, Henry Christian, avait placé l’île sous l’autorité du Haut-Commissariat du Pacifique Ouest, créé en 1877 et établi à Fidji. Le tribunal du haut-commissaire, se disant compétent pour juger cette affaire, a nommé un commissaire judiciaire qui s’est rendu à Pitcairn accompagné par deux officiers du HMS Royalist. Christian a été condamné et transporté à Fidji pour y être pendu. Voir Michael O. Eshleman, « A South Seas State of Nature: The Legal History of Pitcairn Island, 1790-1900 », UCLA Pacific Basin Law Journal, 29-1, 2011, p. 1-35, notamment p. 23-28.
24. Christian & Ors v. R., Appeal Judgment, UKPC 47, ILDC 553 (UK 2006), 30 oct. 2006, Privy Council of the United Kingdom. L’affaire a débuté en 2004, avec l’inculpation de sept hommes. Elle a été traitée au départ par la Cour suprême de Pitcairn, dans laquelle siègent des juges néo-zélandais depuis la loi de 2002 relative aux procès à Pitcairn. Six des accusés ont été reconnus coupables. L’affaire a ensuite été portée devant la cour d’appel de Pitcairn, créée depuis peu, puis devant le Comité judiciaire du Conseil privé. Pour deux excellentes études qui examinent en détail ces procédures juridiques, voir D. Oliver, Justice, Legality, and the Rule of Law, op. cit. ; et Michael O. Eshleman, « A Preliminary Legal Bibliography of the Pitcairn Islands, South Pacific Ocean », Law Library Journal, 106-2, 2014, p. 221-236. À propos de l’histoire de la juridiction à Pitcairn, voir M. O. Eshleman, « A South Seas State of Nature », art. cit.
25. Case for Appellants, submitted to Privy Council, Case for Len Calvin Davis Brown, Dennis Ray Christian et Randall Kay Christian, 31 mai 2006, https://evols.library.manoa.hawaii.edu/server/api/core/bitstreams/8cd4184b-5d7d-4cdb-8691-436191ddd8f8/content. Cet appel n’est qu’un cas parmi d’autres. Une imposante quantité de documents relatifs à cette affaire sont disponibles sur le site eVols de l’université de Hawaiʻi à Mānoa.
26. Christian & Ors v. R., Appeal Judgment, UKPC 47, ILDC 553 (UK 2006), 30 oct. 2006, Privy Council of the United Kingdom. Dans une étude importante, Dawn Oliver explique : « Dans la mesure où les jugements sont censés communiquer aux parties et au public les motifs d’une décision, l’approche formaliste se révèle insuffisante et expose la cour aux critiques, et, dans le cas présent, à l’accusation de déférence excessive envers l’exécutif » (Dawn Oliver, « The Pitcairn Prosecutions, Paper Legal Systems, and the Rule of Law », in D. Oliver [dir.], Justice, Legality, and the Rule of Law, op. cit., p. 23-38, ici p. 26). Deux des juges, Lord Woolf et Lord Hope, ont rejeté le recours, mais reconnu une partie de ces problèmes.
27. Pour ne citer qu’un seul exemple, Trevor Lummis qualifie les événements de Pitcairn de « drame poignant » (Trevor Lummis, Pitcairn Island: Life and Death in Eden, Londres, Routledge, 1997, p. 4).
28. G. Dening, Le Bounty, op. cit. Outre les conflits à bord au sujet de l’autorité, les événements ultérieurs montrent que certains marins ne considéraient pas la mutinerie comme un rejet définitif de la puissance britannique. Les matelots restés à Tahiti ont pris le risque d’être arrêtés et jugés, dans l’espoir d’échapper à la pendaison s’ils expliquaient pourquoi ils avaient participé à la mutinerie. Ce pari, certains l’ont gagné. Sur les 10 marins jugés à Londres, 7 ont été acquittés ou pardonnés, et seulement 3 ont été pendus. Quand les mutins furent retrouvés vingt ans plus tard, et alors que l’Amirauté avait juré de les punir, Adams ne fut pas arrêté. Il fut amnistié en 1825. Ces potentielles interprétations contredisent l’idée selon laquelle les mutineries étaient l’expression d’un « radicalisme maritime ». Voir Niklas Frykman et al., « Mutiny and Maritime Radicalism in the Age of Revolution: An Introduction », International Review of Social History, 58-S21, 2013, p. 1-14.
29. T. W. Nechtman, The Pretender of Pitcairn Island, op. cit., p. 7 et 137. Sur ce plan, Hill ne sortait pas du lot : il y avait chez beaucoup d’hommes de l’Empire britannique du xixe siècle ce mélange de penchants tyranniques et de zèle réformateur. Voir, sur ce point, L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., chap. 2.
30. Une série de restrictions en a remplacé une autre : à la fin des guerres napoléoniennes, le gouvernement a décidé que les lois sur la navigation devaient s’appliquer en Nouvelle-Galles du Sud. Il cherchait ainsi à limiter les activités commerciales étrangères dans les ports britanniques. Immédiatement, la question s’est posée de savoir si le commerce entre les îles serait considéré comme étranger s’il était mené par des marchands britanniques. Le monopole de la Compagnie s’est effondré en 1813. En 1835, le gouvernement a clarifié la situation : les îles du Pacifique Sud n’étaient pas britanniques, mais elles n’étaient pas non plus étrangères eu égard aux lois sur la navigation. John Manning Ward, British Policy in the South Pacific, 1786-1893: A Study in British Policy Towards the South Pacific Islands Prior to the Establishment of Governments by the Great Powers, Sydney, Australasian Publishing Company, 1948, p. 29. La question soulève une ambiguïté supplémentaire quant aux limites et à la portée de l’empire. Voir aussi L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., chap. 6.
31. L’autorité de Phillip s’étendait précisément aux îles situées entre 10° 37’ sud et 43° 39’ sud. J. M. Ward, British Policy in the South Pacific, op. cit., p. 35.
32. Phillip a nommé des juges de paix sur plusieurs îles « adjacentes » et, pour tenter de contenir les anciens prisonniers britanniques qui causaient des troubles dans la région, il a demandé aux navires quittant Port Jackson d’acheter des « bons de bonne conduite ». J. M. Ward signale que ces deux mesures étaient « probablement illégales » (British Policy in the South Pacific, op. cit., p. 35).
33. « An Act for the More Speedy Trial of Offences Committed in Distant Parts Upon the Sea », 46 Geo. 3. c. 54, 23 mai 1806, https://www.dloc.com/CA01200167/00001/images/0.
34. « An Act for the More Effectual Punishment of Murders and Manslaughters Committed in Places Not Within His Majesty’s Dominions », 57 Geo. 3. c. 53, 27 juin 1817.
35. Museums of History, New South Wales, « Vice-Admiralty Court of NSW, 1787-1911 », https://mhnsw.au/guides/vice-admiralty-court-nsw-1787-1911/#Vice-Admiralty-Court-1787-1812.
36. M. Hickford, Lords of the Land, op. cit., p. 73 et 93-94 ; L. Benton, They Called It Peace, op. cit., p. 159-160.
37. L. Benton, They Called It Peace, op. cit., chap. 5. L’action des capitaines s’inscrivait dans une stratégie impériale plus large : pour des empires qui développaient leurs capacités militaires à l’échelle mondiale, la délégation de l’autorité juridique était un moyen d’accroître leur puissance.
38. L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., chap. 6.
39. L. Benton et A. Clulow, « Protection Shopping Among Empires », art. cit.
40. Au sujet de Brooke, voir L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., p. 140-145.
41. Sydney, State Library of New South Wales, Sir Joseph Banks Papers, série 71.05, « Capt Pipon’s Narrative of the State Mutineers of H. M. Ship Bounty Settled on Pitcairns Island in the South Sea », sept. 1814.
42. En 2006, dans l’affaire portée devant le Comité judiciaire du Conseil privé, les requérants ont soutenu que la décision de ne pas arrêter Adams démontrait que l’île ne se trouvait pas sous la juridiction des Britanniques (Case for Appellants, submitted to Privy Council, Case for Len Calvin Davis Brown, Dennis Ray Christian et Randall Kay Christian, 31 mai 2006, https://evols.library.manoa.hawaii.edu/server/api/core/bitstreams/8cd4184b-5d7d-4cdb-8691-436191ddd8f8/content).
43. Alan Strode Campbell Ross et Albert W. Moverley, The Pitcairnese Language, New York, Oxford University Press, 1964, p. 62 ; Donald H. McLoughlin, « The Development of the System of Government and Laws of Pitcairn Island From 1791 to 1971 », in The Laws of Pitcairn, Henderson, Ducie and Oeno Islands, Wembley, Government of the Islands of Pitcairn, Henderson, Ducie and Oeno, éd. revue, 1971 ; Adrian Michael Young, « Mutiny’s Bounty: Pitcairn Islanders and the Making of a Natural Laboratory on the Edge of Britain’s Pacific Empire », thèse de doctorat, université de Princeton, 2016, p. 70.
44. Amasa Delano, A Narrative of Voyages and Travels, in the Northern and Southern Hemispheres: Comprising Three Voyages Round the World […], Boston, E. G. House, 1818, p. 139. A. M. Young dit qu’ils revendiquent le statut de « Britanniques transplantés » (« Mutiny’s Bounty », op. cit., p. 57).
45. Frederick W. Beechey, Narrative of a Voyage to the Pacific and Beering’s Strait, Londres, Henry Colburn and Richard Bentley, 1831, p. 121.
46. John Barrow, « Recent Accounts of the Pitcairn Islanders », The Journal of the Royal Geographical Society of London, 3, 1833, p. 156-168, ici p. 161.
47. A. M. Young, « Mutiny’s Bounty », op. cit., p. 67. Cette revendication de Britishness constituait également une stratégie de survie. T. Lummis remarque que si les insulaires avaient « été perçus comme autochtones, un groupe d’aussi petite taille aurait très facilement pu être détruit en étant réduit au travail forcé ou en esclavage » (Pitcairn Island, op. cit., p. 130-131). Dans une étude récente, Linda Colley soutient que les visiteurs considéraient les habitants de l’île comme des « personnes non blanches, de culture mêlée ». En réalité, les observateurs ont identifié chez eux, malgré quelques signes douteux, des traits constants de Britishness. Voir Linda Colley, The Gun, the Ship, and the Pen: Warfare, Constitutions and the Making of the Modern World, New York, Liveright, 2021, p. 253.
48. John Barrow, The Eventful History of the Mutiny and Piratical Seizure of H.M.S. Bounty: Its Cause and Consequences, Londres, J. Murray, 1831, p. 339.
49. Philip Pipon, « The Descendants of the Bounty’s Crew: As First Discovered by the Briton and Tagus Frigates – From the Unpublished Mss. of the Late Capt. Pipon, R.N. », The United Service Journal and Naval and Military Magazine, 1, 1834, p. 191-199, ici p. 192.
50. Sydney, State Library of New South Wales, Sir Joseph Banks Papers, série 71, Copie d’une lettre du capitaine Sir Thomas Staines (HMS Briton) au vice-amiral Dixon, au large de Valparaiso, 18 oct. 1814.
51. J. Barrow, « Recent Accounts of the Pitcairn Islanders », art. cit., p. 165.
52. Le déplacement coûta environ 400 livres à l’Amirauté – une somme importante. Voir H. E. Maude, « Tahitian Interlude: The Migration of the Pitcairn Islanders to the Motherland in 1831 », The Journal of the Polynesian Society, 68-2, 1959, p. 115-140, ici p. 135.
53. T. Lummis, Pitcairn Island, op. cit., p. 136.
54. J. Barrow, « Recent Accounts of the Pitcairn Islanders », art. cit., p. 159.
55. Ibid., p. 160.
56. T. Lummis, Pitcairn Island, op. cit., p. 136.
57. Young et Adams, qui avaient survécu au tumulte des premières années, étaient parvenus à ramener le calme sur l’île au terme d’une période très violente. Bien qu’Adams demeurât le patriarche pendant près de trois décennies, la famille Christian conservait une autorité résiduelle en vertu du prestige que lui donnaient le rang et le rôle de Fletcher Christian dans la mutinerie.
58. J. Barrow, « Recent Accounts of the Pitcairn Islanders », art. cit., p. 160. Quintal avait de bonnes raisons d’aspirer au pouvoir. Il avait eu un enfant illégitime avec une des filles d’Adams, Dinah : le patriarche avait d’abord condamné celle-ci à être fusillée, mais l’opposition soulevée par sa décision l’avait contraint au pardon. Quintal épousa ensuite la fille d’Adams et le scandale s’estompa. Néanmoins, cet épisode lui avait fait comprendre, de façon brutale, les conséquences potentielles d’une mise à l’écart du pouvoir.
59. Hill était arrivé à Tahiti au début de l’année 1832. Il avait 59 ans lorsqu’il débarqua à Pitcairn.
60. Joshua Hill, The Humble Memorial of Joshua Hill […], Londres, 1841, p. 10.
61. T. Lummis, Pitcairn Island, op. cit., p. 97. Pour un exemple caractéristique, où Hill est décrit comme un « sociopathe », voir Robert W. Kirk, Pitcairn Island, the Bounty Mutineers and Their Descendants: A History, Jefferson, McFarland and Company, [2008] 2014, p. 83-85.
62. T. W. Nechtman, The Pretender of Pitcairn Island, op. cit., p. 7.
63. « Voyage of Her Majesty’s Ship Acteon, Captain the Right Honourable Lord Edward Russell », The Nautical Magazine and Naval Chronicle, 7, 1838, p. 514-522, ici p. 520.
64. « Copy of a Letter, dated Pitcairn’s Island, 3rd October 1833, from the Public Functionaries and others, to Captain Joshua Hill, Teacher, &c », in Walter Brodie, Pitcairn’s Island, and the Islanders, in 1850, Londres, Whittaker & Co., 1851, p. 193-194, ici p. 194. L’expression provient d’une lettre supposément écrite par les alliés de Hill à Pitcairn.
65. « The Humble Petition of the Principal Native Inhabitants of Pitcairn’s Island, Dated 19th June, 1834, to His Excellency Lord James Townshend […] », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 204-210, ici p. 204.
66. Selon T. W. Nechtman, « cette manœuvre permettait à la fois d’attester que les trois Anglais de Pitcairn étaient bel et bien des étrangers et de donner davantage d’importance à l’indigénéité des insulaires » (The Pretender of Pitcairn Island, op. cit., p. 154).
67. « The Humble Petition of John Evans, two years resident on Pitcairn’s Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 190-193, ici p. 192.
68. J. Barrow, « Recent Accounts of the Pitcairn Islanders », art. cit., p. 168 ; J. Hill, The Humble Memorial…, op. cit., p. 3.
69. J. Hill, The Humble Memorial…, op. cit., p. 3-4.
70. Notre interprétation diverge de celle de T. W. Nechtman, pour qui les actions de Hill équivalaient à une mutinerie visant à « soustraire illégalement l’île de Pitcairn au contrôle de Londres » (T. W. Nechtman, The Pretender of Pitcairn Island, op. cit., p. 165).
71. « The Humble Petition of George Hann Nobbs, late Teacher at Pitcairn’s Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 179-185, ici p. 184. Brodie écrit que son auteur est George Hann Nobbs, mais celui-ci apparaît sous le nom « George Hunn Nobbs » dans l’écrasante majorité des sources.
72. « The Humble Petition of John Evans, two years resident on Pitcairn’s Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 190-193, ici p. 191-192. La pétition de Nobbs est rédigée dans des termes largement identiques : « Sitôt qu’un navire apparaissait au large de l’île, un canoë était envoyé à son bord, ce qui empêchait les officiers et l’équipage de se rendre dans nos maisons, et nous étions menacés du fouet si nous proposions d’aller à bord » (« The Humble Petition of George Hann Nobbs, late Teacher at Pitcairn’s Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 179-185, ici p. 183).
73. John Buffett, « A Narrative of 20 Years’ Residence on Pitcairn’s Island », partie 5, The Friend of Temperance and Seamen, 4-7, 1846, p. 50-51, ici p. 50.
74. J. Hill, The Humble Memorial…, op. cit., p. 6.
75. Ibid., p. 7. Bien que l’auteur de cette description ne soit pas nommé, il s’agit très probablement de Hill. Selon Buffett, ce dernier avait convaincu Quintal et les deux autres anciens que « les officiers les considéreraient comme des hommes de guerre » (« A Narrative of 20 Years’ Residence… », partie 5, art. cit., p. 50).
76. TNA, ADM 1/48, Lettre du capitaine Edward Russell (HMS Actaeon) au commodore Francis Mason, janv. 1837.
77. TNA, ADM 1/1819, Lettre du capitaine Charles Fremantle (HMS Challenger) à l’Amirauté, 30 mai 1833. Fremantle explique : « Même alors, je découvris combien il était difficile d’obtenir la vérité en quelque matière que ce soit. » En se conduisant en agent du droit, Fremantle suivait une pratique courante de la part des Britanniques dans la région – et dans le reste du monde. Voir L. Benton, They Called It Peace, op. cit., chap. 5.
78. D’après Hill, Fremantle « convoqua une réunion publique pour enquêter sur les affaires courantes au sein de la population » (The Humble Memorial…, op. cit., p. 5). À propos des enquêtes menées par les capitaines de la Navy dans d’autres îles du Pacifique Sud, voir L. Benton, They Called It Peace, op. cit., chap. 5.
79. J. Barrow, « Recent Accounts of the Pitcairn Islanders », art. cit., p. 166.
80. Lettre de Joshua Hill à Lord James Townsend, 20 juin 1834, citée dans W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 198-202, ici p. 201.
81. J. Hill, The Humble Memorial…, op. cit., p. 4.
82. Daniel Owen Spence, A History of the Royal Navy: Empire and Imperialism, Londres, I. B. Tauris, 2015, p. 67.
83. John Bach, « The Royal Navy in the Pacific Islands », The Journal of Pacific History, 3-1, 1968, p. 3-20, ici p. 6.
84. J. Hill, The Humble Memorial…, op. cit., p. 3 et 6.
85. On trouvera ces pétitions dans l’ouvrage de W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 179-185, 190-193 et 198-202.
86. « The Humble Petition of George Hann Nobbs, late Teacher at Pitcairn Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 179-185, ici p. 182.
87. Copie d’une lettre de John Buffett à Lord James Townshend, in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 185-188, ici p. 187.
88. Lettre de Joshua Hill à Lord James Townshend, 20 juin 1834, in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 198-202, ici p. 198.
89. « The Humble Petition of the Principal Native Inhabitants of Pitcairn’s Island, Dated 19th June, 1834, to His Excellency Lord James Townshend […] », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 204-210, ici p. 209.
90. Ibid., p. 207.
91. Cette correspondance est reprise dans W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 174-176 (p. 176 pour l’extrait cité). Voir aussi T. W. Nechtman, The Pretender of Pitcairn Island, op. cit., p. 170.
92. TNA, ADM 1/48, Lettre du capitaine Edward Russell (HMS Actaeon) au commodore Francis Mason, janv. 1837.
93. TNA, ADM 1/48, Lettre du capitaine Edward Russell (HMS Actaeon) au commodore Francis Mason, janv. 1837.
94. La formule est de J. M. Ward, British Policy in the South Pacific, op. cit., p. 275-276.
95. « Laws and Regulations of Pitcairn’s Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 85-91.
96. A. M. Young, « Mutiny’s Bounty », op. cit., p. 19. F. M. Bladen écrit que « le capitaine Eliott du H.M.S. Fly prit formellement possession de l’île au nom du gouvernement britannique, à la date précise du 29 novembre 1838 » (« Settlement of the Pitcairn Islanders on Norfolk Island », The Australian Historical Society: Journal and Proceedings, 2-1, 1906, p. 1-12, ici p. 2). T. Lummis affirme, pour sa part, que les actions de Eliott « firent de Pitcairn une île britannique » (Pitcairn Island, op. cit., p. 154). Kenneth Roberts-Wray explique que, le 29 novembre 1838, « le capitaine Eliott prit possession au nom de la couronne » (Commonwealth and Colonial Law, Londres, Stevens & Sons, 1966, p. 906). De la même manière, R. W. Kirk avance que Pitcairn est devenue une « composante de l’Empire britannique » en 1838 (Pitcairn Island…, op. cit., p. 89). À l’inverse, certains historiens refusent de prêter un caractère décisif aux actions de Eliott. Voir Louis Assier-Andrieu, « Pitcairn, le vaisseau des mutinés. Note sur une dépossession culturelle », in É. de Mari et D. Taurisson-Mouret (dir.), L’empire de la propriété. L’impact environnemental de la norme en milieu contraint, vol. 3, Exemples de droit colonial et analogies contemporaines, Paris, Éditions Victoire, 2016, p. 53-62.
97. Il fait cette déclaration pour répondre aux questions de l’ONU au sujet des perspectives d’indépendance des territoires coloniaux, y compris minuscules, TNA, FCO 32/1252, Foreign and Commonwealth Office, internal memorandum, « United Nations Interest in Pitcairn », 5 août 1975.
98. L. Colley souligne que la Navy s’est faite la protectrice d’un peuple indépendant. D’après elle, Eliott est venu « porter secours » aux insulaires et a su trouver une issue favorable pour « cette population majoritairement non blanche, de culture mêlée » qui était menacée par des navires de passage. L’intervention de Eliott aurait donc permis, selon elle, de repousser les « envahisseurs blancs » (The Gun, the Ship, and the Pen, op. cit., p. 260). R. W. Kirk affirme qu’à cette époque, Pitcairn était une « nation distincte » (Pitcairn Island…, op. cit., p. 88).
99. Case for Appellants, submitted to Privy Council, Case for Len Calvin Davis Brown, Dennis Ray Christian et Randall Kay Christian, 31 mai 2006, https://evols.library.manoa.hawaii.edu/server/api/core/bitstreams/8cd4184b-5d7d-4cdb-8691-436191ddd8f8/content.
100. Lauren Benton et Benjamin Straumann, « Acquiring Empire by Law: From Roman Doctrine to Early Modern European Practice », Law and History Review, 28-1, 2010, p. 1-38. Les juristes européens considéraient le plus souvent que les non-Européens étaient maîtres de leurs terres, position qui leur permettait d’affirmer (parfois tout en amassant des preuves d’occupation) que les habitants autochtones leur avaient cédé ou vendu des droits de souveraineté.
101. Cet aspect rendait la possession particulièrement séduisante dans le cas où il existait deux rivaux – s’agissant par exemple de la concurrence entre colons espagnols et portugais dans le Nouveau Monde ou lors des expéditions aux Moluques. Le traité de Tordesillas (7 juin 1494), dont on considère souvent à tort qu’il a partagé le monde entre deux souverainetés, a accordé aux couronnes portugaise et espagnole le droit de « découvrir et posséder » des territoires dans leurs sphères respectives. Il fallait que les couronnes dirigent les sujets pour qu’ils pratiquent et documentent la découverte et la possession, et les deux puissances se sont employées à collecter et à divulguer les éléments pertinents. D’autres empires leur ont emboîté le pas, en cherchant à contester les revendications territoriales ibériques et à construire leur propre sphère d’influence. Voir Lauren Benton, « Possessing Empire: Iberian Claims and Interpolity Law », in S. Belmessous (dir.), Native Claims, op. cit., p. 19-40. Tamar Herzog analyse cette concurrence territoriale entre Portugais et Espagnols dans le monde atlantique, mais laisse de côté la conception romaine de la possession dont traitent L. Benton et B. Straumann dans « Acquiring Empire by Law », art. cit. Voir aussi Tamar Herzog, Frontiers of Possession: Spain and Portugal in Europe and the Americas, Cambridge, Harvard University Press, 2015.
102. S. Banner, Possessing the Pacific, op. cit. D’autres historiens et historiennes ont remarqué l’importance des pratiques de possession, mais sans saisir toutefois leur caractère indéterminé. Patricia Seed a ainsi établi une liste des cérémonies européennes de possession : ériger des marqueurs de pierre, disperser de la terre, hisser le drapeau, enregistrer des particularités géographiques, fonder des villes et mener des procès publics. Mais cette approche néglige l’importance des preuves de possession intelligibles par les puissances rivales. Patricia Seed, Ceremonies of Possession in Europe’s Conquest of the New World, 1492-1640, New York, Cambridge University Press, 1995.
103. Voir, par exemple, Canberra, National Library of Australia, NLA MS 2, « Secret Instructions for Lieutenant James Cook Appointed to Command His Majesty’s Bark the Endeavour », 30 juil. 1768.
104. Lauren Benton et Adam Clulow, « Empires and Protection: Making Interpolity Law in the Early Modern World », Journal of Global History, 12-1, 2017, p. 74-92. Il arrivait que les puissances européennes rejetassent les demandes qui leur étaient faites de formaliser les accords de protection et de reconnaître des États comme protectorats : c’est ce que fit le gouvernement anglais à Tahiti et en Uruguay au milieu du xixe siècle. Voir L. Benton et L. Ford, Rage for Order, op. cit., chap. 6.
105. Lauren Benton, Adam Clulow et Bain Attwood, Protection and Empire: A Global History, Cambridge, Cambridge University Press, 2017 ; L. Benton et A. Clulow, « Protection Shopping Among Empires », art. cit. ; Amanda Nettlebeck, Indigenous Rights and Colonial Subjecthood: Protection and Reform in the Nineteenth-Century British Empire, Cambridge, Cambridge University Press, 2019.
106. TNA, ADM 1/53, Lettre du capitaine Russell Eliott (HMS Fly) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 25 janv. 1839, contenant le règlement relatif à la désignation d’un magistrat sur l’île de Pitcairn.
107. Greenwich, National Maritime Museum (ci-après NMM), JON/5, Lettre du capitaine Jenkin Jones (HMS Curaçao) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 6 sept. 1841.
108. NMM, Caird Library and Archives, REC/61, Pitcairn Island Register, 1790-1854.
109. NMM, JON/5, Lettre du capitaine Jenkin Jones (HMS Curaçao) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 6 sept. 1841. La configuration du mouillage à Pitcairn rend peu vraisemblables de telles attaques. Les vaisseaux de passage devaient se faire aider par les insulaires pour transporter les membres de l’équipage entre leur navire et le rivage, puisque Pitcairn n’avait pas de port et que seuls les marins locaux savaient naviguer dans ces eaux dangereuses.
110. L. Colley, The Gun, the Ship, and the Pen, op. cit., p. 260. T. Lummis écrit sensiblement la même chose : « L’équipage d’un baleinier resta à terre pendant quinze jours et ces hommes menacèrent de violer toutes les femmes qui se trouveraient à leur portée. Les insulaires furent forcés de se regrouper, armes à la main, afin de protéger les femmes et durent abandonner leurs plantations deux semaines durant » (Pitcairn Island, op. cit., p. 152).
111. D. H. McLoughlin, The Laws of Pitcairn…, op. cit., p. 20.
112. Il est largement établi que les résidents de Pitcairn se sont donné du mal pour présenter une image idéalisée de leur communauté, image sans fondement réel. Cette tactique s’inscrivait dans une longue tradition, consistant à « faire les hypocrites avec les étrangers » ou à s’afficher en « famille vertueuse et innocente » afin d’obtenir autant de soutien que possible de la part du gouvernement britannique. Les citations proviennent de M. O. Eshleman, « A South Seas State of Nature », art. cit., p. 20. Voir aussi TNA, ADM 101/95/4, William Gunn, journal médical du HMS Curaçao, 1841.
113. Eliott écrit qu’il n’a fait halte « qu’un jour à Pitcairn ». Il est arrivé le 29 novembre 1838, mais les réglementations qu’il a établies ont été signées à bord de son vaisseau le 30 novembre 1838, ce qui signifie que sa visite a débordé sur un second jour calendaire.
114. TNA, ADM 1/53, Lettre du capitaine Russell Eliott (HMS Fly) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 25 janv. 1839, contenant le règlement relatif à la désignation d’un magistrat sur l’île de Pitcairn. Quant au code juridique rédigé en même temps par Eliott, il se composait de dix articles. Étant donné la brièveté de son séjour sur l’île, il est presque certain qu’il s’est appuyé sur des lois existantes. Ces articles portent sur la réglementation relative aux animaux, chats, chiens et cochons, mais aussi à l’école, au bois, aux repères et au commerce avec les navires.
115. TNA, ADM 1/53, Lettre du capitaine Russell Eliott (HMS Fly) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 25 janv. 1839, contenant le règlement relatif à la désignation d’un magistrat sur l’île de Pitcairn.
116. Eliott n’a jamais déclaré avoir pris possession de l’île et ses supérieurs affirmaient très clairement que celle-ci n’était jamais devenue une colonie britannique. Voir ci-dessus notre analyse des commentaires de Stephen. Il existe une exception remarquable à cela, dans un document jamais cité auparavant, à savoir la copie d’une lettre conservée sur l’île de Norforlk, où de nombreux habitants de Pitcairn sont allés plus tard s’installer. Manifestement écrite par le Rear Admiral Ross et adressée à Edward Quintal, la lettre affirme que les actes du capitaine Eliott ont « placé l’île [de Pitcairn] sous la protection du drapeau britannique dans la mesure où elle relève des possessions de la Grande-Bretagne » (voir Canberra, National Archives of Australia, CP599/1, copies des correspondances des îles de Pitcairn et Norfolk, 1837-1897, Lettre du Rear Admiral Charles B. H. Ross à Edward Quintal, magistrat sur l’île de Pitcairn, 30 juin 1839). Toutefois, aucun message de ce type n’a jamais été communiqué à l’Amirauté ni au bureau des Colonies. La lettre de Ross – à supposer que la copie fût exacte – avait sans doute pour but d’assurer aux insulaires que la Grande-Bretagne se souciait de leur sécurité. Dans le même temps, d’autres responsables et d’autres habitants de l’île continuaient de considérer comme irrésolu le statut de Pitcairn.
117. Selon T. W. Nechtman, « le cadre administratif défini par Eliott ressemblait beaucoup à celui qu’avait dessiné Hill » (The Pretender of Pitcairn Island, op. cit., p. 268). Le magistrat détenait un pouvoir politique important en sa qualité de « dirigeant en chef [Chief Ruler] de l’île de Pitcairn ». Il était aidé par deux conseillers, mais ces derniers ne jouaient qu’un rôle subalterne. En effet, le magistrat avait le pouvoir de nommer personnellement l’un de ces conseillers. L’autre était « nommé par les suffrages de l’assemblée », mais les décisions prises par le magistrat étaient « définitives ». TNA, ADM 1/53, Lettre du capitaine Russell Eliott (HMS Fly) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 25 janv. 1839, contenant le règlement relatif à la désignation d’un magistrat sur l’île de Pitcairn.
118. TNA, ADM 1/53, Lettre du capitaine Russell Eliott (HMS Fly) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 25 janv. 1839, contenant le règlement relatif à la désignation d’un magistrat sur l’île de Pitcairn.
119. Les insulaires consignaient les navires, les naissances et les décès dans le registre de l’île, mais une partie de la communauté aurait préféré ne pas tenir ce document. TNA, ADM 1/5618, Adresse du Rear Admiral Fairfax Moresby aux habitants de Pitcairn, 17 mai 1853. On notera que ce registre a été tenu par Buffett, puis Nobbs – mais non par le magistrat.
120. « The Late Lieut. James Lowry’s Visit to Pitcairn’s Island, 1839, in H.M.S. Sparrow-hawk », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 164-169, ici p. 166.
121. TNA, ADM 101/95/4, William Gunn, journal médical du HMS Curaçao, 1er juill. 1841-20 sept. 1842.
122. « Extract of a letter from one of the officers of HMS Curaçao », United Service Magazine and Naval and Military Journal, 40-3, 1842, p. 607-611, ici p. 610.
123. Bureau des Colonies, communication officielle relative au rapport du capitaine Eliott, oct. 1839, reproduite dans Pitcairn Privy Council Record of Proceedings, https://evols.library.manoa.hawaii.edu/server/api/core/bitstreams/f9adce4c-aed4-4e90-b159-8a7d6537d236/content. Voir aussi A. Lewis, « Pitcairn’s Tortured Past », art. cit., p. 53.
124. TNA, CO 201/370, Communication officielle de James Stephen, sous-secrétaire d’État permanent aux Colonies, à George William Lyttelton, sous-secrétaire parlementaire à la Guerre et aux Colonies, 14 janv. 1846.
125. Edward Quintal avait été élu en présence de Eliott en 1838, puis reconduit pour un mandat complet en 1839. Son frère Arthur Quintal lui succéda en 1840. Edward mourut jeune l’année suivante.
126. TNA, CO 201/370, Lettre du Lieutenant Commander Henry S. Hunt (HM Ketch Basilisk) au Rear Admiral Richard D. Thomas, 1er août 1844. Le sort de Nobbs a fini par s’améliorer : il a gagné le soutien d’un homme puissant, le Rear Admiral Fairfax Moresby, qui, après avoir visité l’île, l’a envoyé en Angleterre pour qu’il y soit ordonné ministre de l’Église d’Angleterre. À son retour, Nobbs était une figure bien plus forte.
127. NMM, JON/5, Lettre du capitaine Jenkin Jones (HMS Curaçao) au Rear Admiral Charles B. H. Ross, 6 sept. 1841.
128. Un visiteur se rappelle que « le magistrat en chef, accompagné de quelques hommes, vint à bord [leur] souhaiter la bienvenue, et il resta à bord toute la nuit, et il était très reconnaissant des nombreux souvenirs qu[’ils] lui [avaient] offerts » (« Pitcairn Island », The Nautical Magazine and Naval Chronicle, 1854, p. 256-259, ici p. 256).
129. « The Humble Petition of George Hann Nobbs, late Teacher at Pitcairn’s Island », in W. Brodie, Pitcairn’s Island…, op. cit., p. 179-185, ici p. 181.
130. TNA, CO 201/370, Lettre du Lieutenant Commander Henry S. Hunt (HM Ketch Basilisk) au Rear Admiral Richard D. Thomas, 1er août 1844.
131. TNA, CO 201/370, Communication officielle de William Gladstone, 15 janv. 1846.
132. Même après 1898, année où Pitcairn fut inscrite sur la liste des colonies britanniques, les autorités ne sont que très peu intervenues dans ses affaires internes. La situation n’a changé qu’au début du xxie siècle, le scandale suscité par la découverte de décennies de violences sexuelles ayant poussé la Grande-Bretagne à se déclarer compétente en matière criminelle.
133. L. Ford, Settler Sovereignty, op. cit. ; B. Attwood, Empire and the Making of Native Title, op. cit.
134. Kate Stevens, Gender, Violence and Criminal Justice in the Colonial Pacific, 1880-1920, Londres, Bloomsbury Academic, 2023, chap. 1 ; Sally Engle Merry, Colonizing Hawai‘i: The Cultural Power of Law, Princeton, Princeton University Press, 2000.
135. Tracey Banivanua Mar, Decolonisation and the Pacific: Indigenous Globalisation and the Ends of Empire, Cambridge, Cambridge University Press, 2016.
136. Nous empruntons cette formule très à propos à M. Hickford, Lords of the Land, op. cit., p. 3.